Table ronde 2010 à Liège

L’ARTISTE PLASTICIEN FACE AUX SITUATIONS SOCIALES ET FISCALES EN BELGIQUE

 

Compte rendu de la table ronde organisée par le CNAP-AIAP/UNESCO - Belgique, le 31 mai 2010 à l'Auditorium du Grand Curtius à Liège.

Cette importante table ronde fut assurée par les interventions de :

• Monsieur Albert LEMEUNIER (Accueil), Premier Conservateur des Musées de la Ville de Liège.

• Monsieur Francis DESIDERIO (Introduction), Président du Conseil National des Arts Plastiques (CNAP-AIAP/UNESCO) ;

• Madame Marie-Magdeleine de MEEÛS (Modératrice), Experte dans les matières du non-marchand ;

• Monsieur Pierre JEANRAY, Avocat spécialisé en droits juridique et fiscal de l’artiste plasticien ;

• Monsieur Jean-Ferdinand PUYRAIMOND, Avocat spécialisé en droits de propriété intellectuelle et des nouvelles technologies ;

• Monsieur Philippe LEERSCHOOL, Expert comptable.

Les participants ont été accueillis par Monsieur Albert LEMEUNIER, Premier Conservateur des Musées de la Ville de Liège. En guise de prologue, il a évoqué les liens étroits établis entre les collections permanentes du Grand Curtius, les expositions temporaires, telle l’actuelle exposition dédiée à Santiago Calatrava, et la production contemporaine des artistes plasticiens. De plus, le musée met à la disposition des artistes une salle d’exposition, le but étant de s’ouvrir à la nouvelle création afin de susciter l’effervescence artistique.

Suite à l’intervention d’Albert LEMEUNIER, Monsieur Francis DESIDERIO a adressé, en premier lieu, ses plus vifs remerciements au Service des Arts Plastiques de la Communauté française pour leur soutien, ainsi qu’au Service culturel de la Ville de Liège pour la mise à disposition gracieuse de l’Auditorium. Les remerciements qui s’en suivirent étaient destinés aux différents intervenants pour leur présence, ainsi qu’à Madame Pauline BOVY, Attachée au Cabinet de l’Echevin de la Culture, Monsieur Jean-Pierre HUPKENS.

"Un artiste peut être solitaire et solidaire, il peut conduire son travail dans la solitude de l’atelier et participer, dans la cité, aux relations professionnelles et à la vie des arts de son temps", (Albert CAMUS). En lien avec cette citation, l’objectif de cette table ronde était de répondre aux questions et de conseiller l’artiste au mieux dans sa vie professionnelle. Monsieur DESIDERIO a insisté sur la visibilité acquise par l’association, ainsi que la volonté de s’inscrire dans une action de revalorisation du secteur des arts plastiques et visuels, en Belgique et à travers le monde. Il a également brièvement rappelé les services mis en place par l’association comme, par exemple, les aides juridiques et comptables offertes aux membres, ou encore la gratuité d’accès aux musées nationaux et internationaux, ainsi que ses buts principaux, soit l’amélioration de la condition de l’artiste plasticien et visuel et la libre circulation des œuvres à travers le monde.

Le Conseil National (CNAP-AIAP/UNESCO) participe à l’amélioration de la condition de l’artiste, en vue d’une meilleure solidarité professionnelle et citoyenne. Parallèlement, l’association œuvre pour une fortification des liens avec les différentes régions de Belgique et les structures représentatives de l’association internationale (AIAP). La volonté de l’association est de porter haut et fort la parole collective des artistes et de lui rendre la place qui lui revient au sein des institutions culturelles officielles, mais également sur le marché de l’art.

Avant de passer la parole à Madame Marie-Magdeleine de MEEÛS, Monsieur DESIDERIO a annoncé l’ouverture des deux bureaux du Conseil National des Arts Plastiques, à Liège et à Bruxelles. Pour conclure, il a informé les invités de la création d’un site Internet,www.artistescontemporains.be, mis gracieusement à la disposition des membres du CNAP. Cet outil permet aux artistes d’y figurer le catalogue de leurs œuvres, leur parcours artistique, ainsi que l’annonce d’expositions.

Madame Marie-Magdeleine de MEEÛS, dans son rôle d’animatrice, a, en premier lieu, défini le déroulement de la table ronde. Les interventions des conférenciers furent brèves et précises afin de laisser la possibilité aux membres de poser des questions d’ordre général. Madame de MEEÛS a indiqué que les intervenants se tiendraient à la disposition des membres du CNAP après la table ronde pour répondre aux questions plus personnelles. Pour terminer, elle présenta les différents collaborateurs du Conseil National des Arts Plastiques.

La parole fut accordée au premier intervenant, Maître Pierre JEANRAY, avocat spécialisé en droit juridique et fiscal de l’artiste plasticien. Il a traité le thème des :

"Aspects juridiques et légaux de l’activité professionnelle de l’artiste plasticien"

En qualité d’avocat, Maître JEANRAY est consultant pour le Conseil National des Arts Plastiques et assure des consultations juridiques au profit des membres. L’objet de son exposé est de répondre aux questions principales posées lors de ces consultations. Une demande fréquente concerne le statut professionnel de l’artiste plasticien et visuel.

Pour commencer, Maître JEANRAY a établi la distinction entre le travailleur salarié et le travailleur indépendant. Traditionnellement, l’artiste plasticien a toujours été considéré comme travailleur indépendant. Au début, le statut social de travailleur indépendant est difficile à porter pour l’artiste, en particulier pour le débutant, en raison du caractère souvent peu élevé mais également cyclique des revenus artistiques. L’artiste plasticien ou visuel se doit de développer une clientèle, des commandes, des paiements et doit assurer lui-même la couverture de son risque social par le paiement de cotisations sociales trimestrielles. L’intervenant met en avant ces différentes contraintes souvent peu compatibles avec le rythme de travail cyclique de l’artiste (phase de « création » souvent improductive du point de vue des rémunérations en opposition avec une phase d’ « exploitation » où, dans le meilleur des cas, les revenus arrivent de façon regroupées, et donc taxables à un niveau plus élevé, outre les implications en matière de charges sociales).

Maître JEANRAY a fait état de la loi programme du 24 décembre 2002 qui entraîne une modification législative du point de vue du statut social des artistes. Dans ses rapports à l’égard des commanditaires artistiques, l’artiste voit son statut assimilé à la sécurité sociale des travailleurs salariés, ce qui, en principe, implique le paiement par le commanditaire artistique, en plus de la rémunération « nette » prévue pour la prestation artistique commandée, du paiement de cotisations sociales à l’ONSS. Entrée en vigueur le 1er juillet 2003, cette présomption de rattachement de l’artiste, en ce compris le plasticien, à la sécurité sociale des salariés, est appliquée, à moins que l’artiste ne demande expressément d’être reconnu comme travailleur indépendant. Selon Maître JEANRAY, cette loi, appliquée aux artistes plasticiens, ne fonctionne pas. L’artiste plasticien reste donc un artiste indépendant avec toutes les difficultés exposées plus haut, renforcées par le rythme professionnel artistique. À cela s’ajoute une protection sociale moins développée que pour les travailleurs salariés.

Enfin, au vu de ces difficultés, Maître JEANRAY insista sur le fait que l’artiste plasticien ou visuel doit examiner s’il est réellement en état de déclarer une activité professionnelle effective (avec prestations régulières et rémunérations tout aussi régulières de celles-ci) et, dans ce cas, s’il n’est pas possible d’aménager le statut d’indépendant, par exemple, sous forme d’activité complémentaire par rapport à une activité principale, une autre possibilité s’ouvre à eux depuis 2004, en l’occurrence le régime des petites indemnités.

Ce système permet d'être rémunéré comme artiste pour une prestation artistique mais de façon limitée.

Ensuite, Madame Marie-Magdeleine de MEEÛS céda la parole à Maître Jean-Ferdinand PUYRAIMOND, avocat spécialisé en droits de propriété intellectuelle et des nouvelles technologies. Il est intervenu sur le thème des :

"Aspects juridiques et légaux de l’artiste visuel face aux nouvelles technologies"

Maître PUYRAIMOND a commencé son intervention par la définition des nouvelles technologies. Elles concernent particulièrement le web et son utilisation pour la vente de services ou de produits. La législation au sujet des nouvelles technologies est d’esprit commercial. La création d’un site pour promouvoir son activité ou pour la vente est soumise à une législation contraignante. Maître PUYRAIMOND a expliqué également la nature des différentes autres lois, notamment les lois sur le droit d’auteur, le droit de marque et le droit à l’image.

Ensuite, Maître PUYRAIMOND a exposé le rôle du fournisseur de site Internet. Celui-ci peut, soit uniquement donner l’espace informatique – ce qui correspond à un contrat de location – soit il peut également en concevoir le design. Le fournisseur peut alors se réserver des droits sur le site de l’artiste. Une lecture attentive du contrat et des différentes clauses s’impose. Le but d’un site Internet est de favoriser le public le plus nombreux.

La question du droit d’auteur a une importance stratégique. L’artiste peut garder le monopole absolu sur l’exploitation des œuvres. Il peut également se demander quel contrat de licence il désire accorder à son travail, comme par exemple les licences creative commons. Maître PUYRAIMOND insista sur l’importance de la loi du 8 décembre 1992 concernant les données personnelles relatives à une personne physique (nom, âge, sexe, numéro de téléphone, etc.). Généralement, sur le site Internet, l’artiste fait une collecte de ces données pour informer les personnes de son activité. Dans ce cas, il lui faut faire une déclaration à la Commission de la Protection de la Vie privée.

Enfin, un site Internet n’est pas uniquement une fenêtre pour exposer ses œuvres, il peut aussi servir de moyen de vente. La vente directe sur le site est soumise à certaines conditions. Il existe une modification législative récente : la loi sur la pratique du commerce a été remplacée par une loi sur les pratiques du marché et du consommateur. Désormais, cette loi s’applique aux entreprises. L’artiste est donc obligé de respecter les conditions énoncées par cette loi et, notamment, les indications de prix. Une indication des prix, tous droits compris, est obligatoire. Il est tout aussi important de prévoir des conditions de vente au préalable. Pour ce faire, il suffit d’ajouter un lien sur le site Internet. Si l’artiste vend ses œuvres via un site tiers, la responsabilité se déplacera généralement vers le titulaire de ce site tiers ; une lecture attentive du contrat entre l’artiste et le tiers s’impose toutefois pour vérifier que le tiers n’a pas conventionnellement limité ou exclu sa responsabilité.

Pour terminer, Maître PUYRAIMOND a abordé la question du droit de suite. Il s’agit du droit de l’artiste plasticien de se voir payer un pourcentage sur les ventes ultérieures de ses œuvres par des professionnels du marché de l’art, uniquement si cette vente dépasse 1250 euros. Le droit de suite vise à compenser la position défavorable de l’artiste plasticien qui bénéficie rarement de l’utilisation ultérieure de son œuvre.

Suite à l’intervention de Maître PUYRAIMOND, Madame de MEEÛS donna la parole au dernier intervenant, Monsieur Philippe LEERSCHOOL, expert comptable. Il a traité le sujet de la :

"Déclaration fiscale de l’année 2009"

Le premier point abordé par Monsieur LEERSCHOOL était l’obligation de se positionner devant la déclaration fiscale. L’artiste plasticien et visuel est obligé de choisir entre différents statuts. Il doit se définir devant trois catégories : les artistes hobbyistes, les semi-professionnels et les professionnels. En ce qui concerne l’artiste, la présomption est un contrat de travail mais elle est très rarement appliquée. Dans la majorité des cas, l’artiste est toujours un travailleur indépendant et, en tant que tel, il sera affilié auprès d’une caisse de cotisation d’indépendants. Il pourra aisément trouver son indépendance socio-économique vis-à-vis d’un donneur d’ordre. Enfin, l’artiste sera assujetti à la TVA. Pour une œuvre originale, l’artiste a droit à un taux de TVA de 6%. 

Monsieur LEERSCHOOL attira l’attention sur une autre possibilité qui est la création d’une société. La réalisation d’œuvres monumentales entraîne des investissements importants avec un besoin de personnel, de sous-traitants et de matériaux. À partir de ce moment-là, l’artiste retirera ses revenus comme dirigeant d’entreprise. Pour la déclaration fiscale, le travailleur salarié remplit la première partie de la déclaration fiscale. Le travailleur indépendant, quant à lui, doit déclarer son chiffre d’affaires moins les charges dans la deuxième partie. Les charges peuvent être des charges immobilières, organisationnelles et de transport. Elles doivent être mises à jour de manière trimestrielle.

Monsieur LEERSCHOOL a délimité, par la suite, le statut d’artiste hobbyiste. Ce dernier ne doit rien déclarer. Quelle est la limite entre l’artiste amateur et l’artiste professionnel ? Le hobby s’arrête là où commence le bénéfice. L’artiste plasticien peut aussi bénéficier du régime des petites indemnités. Dans ce dernier cas, il ne doit également rien déclarer. Un artiste peut toucher de petites indemnités qui sont prises en charge par le donneur d’ordre. Elles impliquent trois conditions : l’artiste doit posséder une carte d’artiste (elle n’existe pas encore mais est en cours d’élaboration depuis trois ans) ; le montant ne peut dépasser 112,44 euros par jour pour l’année 2009, par donneur d’ordre, avec un total de 2.248,78 euros par an pour l’année 2009 ; la troisième condition est l’interdiction d’être lié au donneur d’ordre par un contrat de travail ou un contrat d’entreprise.

Suite au dernier exposé de Monsieur LEERSCHOOL, Madame de MEEÛS a invité les participants à poser leurs questions aux différents intervenants :

"Questions / réponses"

Est-ce qu’un artiste, étant déjà inscrit à l’ONEM, doit également s’inscrire à l’INASTI ?

Maître JEANRAY prit la parole pour répondre qu’un bénéficiaire aux allocations de chômage ne doit pas s’y inscrire. Les allocations de chômage exigent une disponibilité sur le marché de l’emploi. Si l’activité artistique génère des revenus réguliers, il faut remplir la deuxième partie de la déclaration fiscale réservée aux travailleurs indépendants. À ce moment, l’artiste n’a plus droit aux allocations de chômage. Une cotisation à l’INASTI est donc obligatoire. Il faut faire attention à ne pas bénéficier d’allocations de chômage indues. Il existe deux possibilités : être un artiste amateur et percevoir des allocations de chômage ; ou bien, être un artiste avec un statut de travailleur indépendant. Lorsque l’artiste organise un vernissage, s’il bénéficie d’allocations de chômage, il doit prévenir l’ONEM qu’il n’est plus disponible sur le marché de l’emploi.

Quel est le statut d’un artiste étant travailleur pensionné et possédant un numéro de TVA ?

À cela, Monsieur LEERSCHOOL a répondu qu’il faut prendre garde aux confusions. Ce statut comporte deux cas différents. Le premier cas est celui d’un travailleur indépendant, avec activité complémentaire, assujetti à la TVA. Si le chiffre d’affaire ne dépasse pas 5.580 euros, il peut choisir le régime de la franchise. Ce régime implique une facturation sans TVA, et le travailleur ne peut déduire la TVA des achats (le numéro de TVA est un numéro national). Le second cas fait référence au régime des pensionnés. Il est possible de travailler comme indépendant si le montant ne dépasse pas les 21.000 euros.

Maître JEANRAY ajouta que, si une activité artistique occasionnelle est déclarée à l’ONP, cela n’entraîne aucune perte au niveau de la pension de retraite car l’artiste ne prend pas un emploi destiné à quelqu’un d’autre. Dans ce cas, il n’y a alors pas de limite au niveau de la somme gagnée. Aussi, selon Monsieur LEERSCHOOL, les deux cas peuvent se compléter.

Est-il possible de récupérer de la TVA dans le cadre d’un statut de travailleur indépendant complémentaire ?

Monsieur LEERSCHOOL répondit que l’artiste récupère la TVA à du 21%. Le risque est que cette activité complémentaire soit en perte et que cette dernière ne s’impute sur les revenus de l’artiste salarié (un enseignant par exemple). Il y a alors un remboursement de précompte prélevé par l’employeur. Dès que le fisc le constate, il vous indique que l’activité artistique est considérée comme relevant du statut « amateur » car elle n’est pas bénéficiaire.

Une seconde personne réagit à cette question : « Les explications que vous donnez sont une torture car la réalité des choses rend le tout insoluble en raison du fait que vous vous trouviez de l’autre côté de la barrière. La vocation d’artiste doit être quelque chose qui vous habite. Si je suis peintre, c’est parce que quelque chose me pousse à m’exprimer et à développer ma personnalité. Devant les deux aspects de la personnalité, le besoin d’affirmer ce qui est en soi et entrer en contact avec la société pour être compris par les autres, cela fait partie intégrante de l’art. Je désire que l’art revienne à des notions de métier, de pratique et que l’artiste aille au fond de lui pour dire qui il est. »

Madame DE MEEÛS répliqua en reprenant la définition de l’artiste. Ce dernier a besoin de communiquer. Les intervenants ont compris cette nécessité. Ils ont répondu présent à vos côtés maintenant et dans d’autres moments pour soutenir la créativité.

Que faire lorsque, durant une année, le montant dans le régime de la franchise est dépassé ?

Monsieur LEERSCHOOL prit la parole et signala que, dès que le contrôleur fiscal le constate, l’artiste est replacé dans le régime d’assujettissement normal. Il doit refacturer, TVA comprise, puis la déduire des charges. Attention au phénomène de révision en cas d’entrée dans le régime de la franchise. Le contrôleur va revoir tous les investissements pour lesquels l’artiste a déduit la TVA et va lui demander de la rembourser proportionnellement sur cinq ans.

Faut-il faire attention à ne pas changer de statut ?

Selon Monsieur LEERSCHOOL, c’est possible car, en étant dans le domaine de la franchise, l’artiste devient plus concurrentiel. S’il vend une œuvre à quelqu’un de non assujetti, il ne doit pas facturer la TVA, ce qui revient moins cher. Cela peut être un régime intéressant mais il faut être très prudent.

Doit-on rester, durant trois ans, dans le même statut ?

À ce sujet, Monsieur LEERSCHOOL répondit que la limite peut être dépassée mais que cela le fait replonger dans le statut d’assujettissement le trimestre suivant. L’artiste ne peut se voir empêché de réaliser un chiffre d’affaire inférieur à 5.580 euros.

Dans le cadre d’un statut d’assujettissement, est-il possible de faire revaloir tous les anciens investissements ? Si l’on change de régime, la TVA non perçue est à faire valoir sur de futures œuvres?

Pour Monsieur LEERSCHOOL c’est une position fréquemment défendue. L’administration l’accepte uniquement sur les biens d’investissement. Le calcul de proportion est refait à l’envers.

Est-ce que cela entre en ligne de compte pour les matières premières ?

À cela, Monsieur LEERSCHOOL répondit que le stock n’est pas un bien d’investissement mais un achat de marchandises. Il n’y a donc pas de TVA à récupérer. Maître JEANRAY, quant à lui, ajouta que l’on ne peut déduire l’ensemble des frais exposés pour l’activité artistique (matériaux, peinture, électricité, chauffage) que si l’on n’a vendu que quelques toiles. Les frais seront déduits proportionnellement.

Qu’en est-il de la carte professionnelle d’artiste ?

Madame DE MEEÛS prit la parole et énonça qu’une carte professionnelle d’artiste est prévue par la loi dans le régime des petites indemnités. Le projet est en cours depuis quatre ans et de nombreux critères doivent être établis. Le CNAP délivre une carte professionnelle d’artiste qui donne d’autres avantages. Ce genre de réunion et les conseils font partie du rôle du CNAP.

Est-ce que la visibilité d’un artiste influe sur son statut professionnel ?

Selon Madame DE MEEÛS, il s’agit d’une appréciation subjective de la part du contrôleur de la TVA ou du contrôleur fiscal. Aussi, Maître JEANRAY ajouta que certains artistes peuvent exposer beaucoup en vendant peu. D’autres, qui réalisent des œuvres monumentales, n’exposent pas mais sont cotés.

Est-ce que la constitution d’un fichier de noms est payante lors de la déclaration à la Commission de la Protection de la Vie privée ?

Il est possible de faire la déclaration par voie électronique, indique Maître PUYRAIMOND. Une taxe unique doit être versée pour un traitement c’est-à-dire un fichier utilisé pour une finalité précise. Si d’autres utilisations du fichier sont exploitées, il faut faire une nouvelle déclaration. La loi est stricte et le non respect entraîne une peine pénale. D’autre part, sur le site Internet, il faut également indiquer ce que l’artiste compte faire avec les informations à travers la déclaration de protection de la vie privée. Il faut mentionner pourquoi il traite ces données personnelles, quelles en sont les fins et quels sont les droits de la personne. Ces derniers l’obligent à donner accès aux informations, un droit à la vérification ainsi que le droit de suppression. Il existe des sanctions à toutes ces formalités.

Est-ce que la location d’un « .be » inclut cette déclaration à la Commission de la Protection de la Vie privée ?

Selon Maître PUYRAIMOND, il faut faire soi-même cette déclaration.

Le droit de suite est une réalité juridique mais, en pratique, il n’est pas d’une grande rentabilité pour l’artiste plasticien. Avec l’exposition des œuvres sur le site Internet, n’est-il pas avantageux de recourir à la gestion collective et de déposer les œuvres à la SABAM (ou une autre société comme la SOFAM) ?

D’après Maître PUYRAIMOND, c’est, en effet, en vigueur. Le droit de suite donne une compensation. Les sociétés de gestion s’en chargent et demandent des déclarations régulières de tous les professionnels d’art en Belgique. Elles obtiennent ces déclarations et savent ce qui se vend. L’artiste plasticien isolé n’est pas tout à fait apte à savoir ce que tel professionnel ou telle galerie vend.

Il existe donc des tarifs ? De l’argent revient donc aux artistes plasticiens ?

Maître PUYRAIMOND répondit positivement.

Quel est le rôle exact de la SABAM ou de la SOFAM ?

Le droit de suite a été boosté depuis 2006, signala Maître PUYRAIMOND. L’Union Européenne a constaté qu’il était peu utilisé en pratique. Depuis lors, le droit de suite est plus suivi par les sociétés de gestion de droit. La SOFAM, par exemple, doit déclarer, tous les trimestres par le biais des professionnels du marché de l’art, la liste des œuvres de son répertoire. En tant que personne physique, si l’artiste n’est pas inscrit dans une société de gestion de droit, le droit d’auteur risque de beaucoup moins lui servir. Le droit de suite fait partie du droit d’auteur, ou plutôt, les droits d’auteur. Il s’agit d’un gros conglomérat de prérogatives exclusives données à l’auteur. L’auteur, en droit belge et continental, représente la personne physique qui a créé l’œuvre. On distingue les droits patrimoniaux des droits moraux. Les droits patrimoniaux sont ceux qui sont monnayables (droit de communication, de reproduction, etc.). L’auteur a le monopole sur ces droits. Les droits moraux englobent certains droits comme le droit à l’intégrité. L’œuvre ne peut être modifiée.

Le droit de suite s’exerce durant combien de temps ?

Selon Maître PUYRAIMOND, le droit de suite s’exerce durant autant de temps que les droits d’auteur, c’est-à-dire de son vivant et jusqu’à septante ans après sa mort. Il est possible de toucher un pourcentage pour autant que le prix dépasse 1250 euros selon l’article 13 de la loi. On arrête de toucher des pourcentages au-delà de 500.000 euros, le pourcentage restant bloqué à 0,25%.

Est-ce que les droits d’auteurs sont primordiaux par rapport à tous les autres droits ?

L’auteur détient le monopole sur l’œuvre, expliqua Maître PUYRAIMOND. Lors de la vente d’une œuvre, il faut faire une distinction entre le corps physique de l’œuvre et le corps « métaphysique » de l’œuvre. Le corps physique de l’œuvre c’est le matériau. L’artiste possède des droits d’auteurs sur la forme donnée à cette matière, le corps « métaphysique » de l’œuvre. Dans une simple vente, seule la matière est vendue et non les droits d’auteurs ; un contrat de licence écrit doit être passé pour céder les droits d’auteur.

Peut-on céder ces droits d’auteur à une organisation ?

Maître PUYRAIMOND conclut en disant que les droits d’auteur patrimoniaux peuvent être cédés. Les droits moraux sont, par contre, incessibles en principe. Ils ne peuvent être vendus. Le contrat de cession de droits d’auteur doit être clairement rédigé par écrit. Tout ce qui n’a pas été stipulé dans le contrat ne peut être cédé.

Les séances se sont clôturées par un cocktail.

 

 

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